X-Traversée, 74km 4900m de D+

La distance ne me faisait pas peur: 73 km, j’ai déjà fait ce format là plusieurs fois. Mais le dénivelé me laissait un peu plus perplexe: 4900m de dénivelé positif. Le cadre me semblait idéal: les Alpes Valaisannes et surtout assez proche de chez moi, juste à 2h de voiture. J’étais inscrit depuis l’année dernière, mais suite à la crise sanitaire la course a été reportée cette année. Je cherchais un beau challenge pour ce début de saison, je n’ai pas été déçu.

Je connaissais un peu la course, enfin sur le papier ou plutôt sur le net, j’avais lu avec assiduité les contre-rendus de mon pote Grégo et j’avais vaguement vu le profil (dénivelé) de la course. Je me disais que le dénivelé et la distance devraient bien se faire, même si je n’avais pas vu en détail les pentes de cette course. Non je n’étais pas blasé, mais plutôt insouciant après 1 an et demi de crise sanitaire, cette course serait parfaite pour me préparer à la CCC d’ici fin août. Gregory m’avait très souvent parler du « Mur », de Lourtier (1200m de D+ sur 6km) à la toute fin de la course. Mais tout cela c’était de la théorie, du lointain, du virtuel, des courbes sur un graphique. Mais maintenant je n’étais pas au pied du mur de Lourtier mais aux pieds de la course, départ à la Fouly à 8H du matin ce 3 juillet 2021, enfin les affaires reprenaient.

J’étais arrivé la veille: prise de dossard, mon premier test PCR, oui je suis passé entre les mailles du covid. J’y ai vu mon pote Grégo qui va s’élancer pour la 5e fois sur la grande, la X-Alpine, un monstre sur le papier: 111km et 8300m de D+. Le rapport distance / dénivelé est énorme par rapport aux Ultras classiques, qui sont plutôt dans les 170km pour 10000m de D+. Mais Grégo commence à me dire que la petite soeur, la X-Traversée est quand même un gros morceau, je crois que je commence à réaliser que cela ne va pas être facile.

Dans le sas prêts à bondir

Juste avant le départ, je rejoins les amis de Grego rencontrés la veille et mon pote Alain de Cop’ain de Trail. Alain m’avait déjà accompagné sur le Renarde de la l’UTMJ, il est rapide et endurant, de plus, avantage sur moi, il a déjà fait la course il y a quelques années et se souvient lui aussi très bien du « Mur » de Lourtier. Tiens c’est bizarre tout le monde semble redouter ce fameux mur, ça me rappelle le mur de la « Dent du Chat » près d’Aix-les-Bains lors du Grand Trail du Lac avec ces 900m de D+ sur 4km.

Chaque course a sa musique, son totem, pour se marquer le départ. Verbier ne déroge pas à la règle, bien que je n’ai pas bien entendu le speaker nous faire sa présentation, j’ai bien reconnu le poème de Rudyard Kipling (If …) et ensuite bien entendu la chanson du Boss (Bruce Sprinsteen) « Born to Run ». Si la musique du Boss m’a vraiment mis de bonne humeur, je me rappellerai toujours la première fois que j’ai lu le poème de Kipling, je n’avais pas plus de 10 ans, mon père me dit « tiens, lis cela », 40 ans plus tard je me souviens encore de ce jour là et de cette belle leçon de vie que Kipling et mon père venaient de me donner.

La Fouly, km 0, 8h00 du matin

Mais revenons à notre Traversée, Alain tient à rester avec moi le plus longtemps possible, il ne s’est pas trop entrainé et préfère s’économiser sur le début de la course, vu ma vitesse il sera tranquille avec moi. Je suis un vrai sénateur dans les premières heures, les suivantes aussi.
Le départ est lancé, enfin j’écrase une petite larme avec tous les encouragements du public Valaisan ça fait plaisir de se retrouver un peu dans le monde d’avant.

Le départ est lancé je me place dans les derniers avec Alain et nous montons tout doucement vers les lacs de Fenêtre sur un chemin montant peu pentu et très roulant sur les premiers kilomètres. Alain semble avoir les jambes qui le démangent, car après quelques hectomètres, je le vois disparaitre devant moi. Il voulait me suivre, mais je suis définitivement trop lent pour lui.

Tout est très vert et très pentu au début, très rapidement, la verdure devient plus rare et la végétation laisse place à des sommets très gris. Vers le col de Fenêtre, la neige apparait. Cela glisse un peu, dans la longue ascension des coureurs, je fais partie du peloton de queue, nous avançons tous à peu près à la même vitesse. On passe ce col et nous voilà officiellement en Italie pour quelques kilomètres. Les sentiers sont un peu plus rocailleux, il ne faut pas tomber dans la précipitation, je cours/marche doucement pour ne pas tomber. Je remarque quelques coureurs coureuses qui vont me suivre tout au long de la course et avec certains on ne va pas arrêter de se doubler. Je passe la route qui monte au Grand Saint-Bernard, je vois passer les motards et autres touristes en car ou en voiture. Je regarde à droite à gauche et je continue sur le chemin. A un moment j’ai l’impression que mon cœur s’emballe, j’ai un coup de moins bien qui dure quelques minutes, je me dis que c’est surement dû à l’altitude et je repars.
Arrivée vers le Grand Saint Bernard, me voilà mieux, je cours un peu et je suis accueilli par des « Grandé, Grandé »: je suis bien en Italie.

Grand Saint-Bernard, 12.7km, 2h57 de course et 1200m de D+

Je prends quelques tranches de saucisson italien et du carburant pour la suite, je ne m’attarde pas sur ce ravitaillement, il reste plus de 60km. Avant la montée du Gd Saint Bernard, mon mollet me tiraille de nouveau un peu. Je sens une légère gène, mais rien de grave, celui-ci m’a causé des soucis en début d’année, je me dis que je ne risque rien. La dernière fois qu’il m’a fait des misères j’étais en train de faire du fractionné et le muscle à lâché d’un coup. Aujourd’hui, le muscle est chaud et je ne risque pas de faire du fractionné, il est un peu douloureux à la montée. Actuellement je ne risque rien et maintenant m’attendent 14km de descente.

Je descends tranquillement, sur Bourg Saint-Pierre, le chemin est plutôt roulant mais les nuages s’annoncent un peu sombres. Quelques coureurs s’arrêtent pour mettre leur vestes de pluie. Je décide de ne pas mettre la mienne et de ne pas perdre de temps, pour éviter de l’enlever d’ici 30min. Pour une fois, j’avais raison, un petit crachin et puis s’en va. Je commence à doubler, plusieurs coureurs dont un Américain avec une accent Belge de Bruxelles, la Suisse est très internationale.

Les paysages sont magnifiques en redescendant sur Bourg Saint-Pierre, le lac des Toules et son barrage. Je continue à doubler en descente, mais la future montée me fait craindre le pire sur mon classement. J’ai encore un petit coup de moins bien dans une minuscule montée pour reprendre une route, bizarre cette sensation soudaine de ne plus avancer. J’entre dans la ville de Bourg-Saint-Pierre, en courant plus ou moins.

Bourg-Saint-Pierre, 25.4km, 4h53 de course et 1600m de D+

Je m’arrête un peu, j’ouvre mon téléphone et tout mon club de supporters m’encourage avec des messages sur WhatsApp. Ma femme m’encourage en me disant que je suis lent, 4km/h de moyenne. Oui, je sais je suis lent, je sais mais ça monte un peu aussi et il faut que je gère encore le double de la distance et du dénivelé, je suis juste au tiers de la course. Son message était plutôt un message d’encouragement pour me dire que je suis parti prudemment.

Je ne m’attarde pas au ravitaillement, je repars aussi vite, une grosse montée m’attend, je ne sais plus combien de D+ m’attendent, mais je sais que ça va être dur et long. Le chemin est très praticable ça commence à monter et plein de coureurs que j’ai dû dépasser au ravitaillement commencent à me redoubler. Un coureur Suisse me parle un peu, il me dit de le suivre pour ne pas perdre le rythme, il va un peu plus vite que moi. Je lui dis de laisser faire et que je ne pourrai pas le suivre vu ma vitesse ascensionnelle d’escargot. En fait il finira une place devant moi à Verbier. On passe encore et encore des rivières, des endroits bien humides, je dois à chaque fois faire très attention à mon capteur de foulé Stryd (mesure de puissance). Il est résiste à l’eau mais il n’est pas complétement étanche. Ça monte encore et encore, j’arrive à peu près à suivre les autres coureurs.

Le parcours est roulant avec encore beaucoup de végétation, on continue à monter en direction du ravitaillement de Mille. Cela devient presque plat et lunaire, le temps se gâte et il commence à faire frais, je me surprends à courir et a redoubler mon coureur Suisse qui lui marche juste avant le ravitaillement.

Mille, km 37.4, 7h57 de course et 2500m de D+

Je me ravitaille, une bonne soupe chaude me fait le plus grand bien, je pose ma gamelle et je vais l’oublier, je ne m’en apercevrai qu’au ravitaillement suivant. Avant de repartir je mets ma veste de pluie, il pleut à peine, mais il fait humide avec un peu de vent. Je remplis bien mes flasques à fond, très important pour la suite. J’adore le goût cerise de la boisson Decathlon, j’aime de plus en plus leurs produits, leur gels et autres boissons sont assez bien notés, quand au prix, je n’en parle pas : c’est du Decathlon. Certains me diront que leurs produits ne sont pas très solide et bien dans à peine 1km je vais leur prouver le contraire.
Je repars du ravitaillement, je redouble une coureuse que j’ai déjà doublé une ou deux fois, je lui passe devant dans une descente à peine technique. Je m’éloigne de quelques mètres … et vlan, je tombe à terre en pleine descente. Je me retiens tant bien que mal avec mes mains et je ressens un airbag amortir ma chute. La flasque Decathlon, pleine à craquer de boisson gout cerise, amortie très bien ma chute. La flasque résiste bien, n’explose pas. Je me redresse, aucune casse, les mains un peu sales, le short également. Mais rien de plus, la flasque a dû retenir environ la moitié de mon corps après une chute de ma hauteur environ. Rien, pas d’explosion, pas de fuite, la flasque est comme neuve et me servira jusqu’à la fin de la course et surement bien plus encore. Je n’ose calculer la pression exercée sur la flasque, mais Decathlon, oui à fond la forme !!

Après cette chute sans gravité, je redouble la coureuse que j’étais en train de dépasser. Je crois que je prends un peu le large, mais elle aussi, je vais la croiser jusqu’à la fin. Les paysages deviennent moins lunaires en descendant et encore des cours d’eau à passer, des petits ponts ou des passages à pied en eaux froides.
Ça y est, le passage sur le glacier Panossière s’annonce et je pars sur le parcours de la X-Traversée uniquement, Gregory qui fait la X-Alpine est derrière moi, j’ai 40km d’avance et le jeu sera d’arriver avant lui à l’arrivée. Ah oui il est bien plus rapide que moi, il fini dans les 10-20% les plus rapides, moi aussi mais dans la section des moins rapides, après quelques calculs, je devrais arriver avant lui et filmer son arrivée.

Cabane Brunet, km 45.3, 9h35 de course et 2700m de D+

Je fais la connaissance d’un Français qui vient d’Alsace ou de Lorraine, on marche au même rythme. Il m’interpelle sur ma belle et nouvelle frontale Stoots que je n’ai pas encore vraiment essayé. J’ai pu la tester à peine 1 heure sur un terrain facile il y a quelques jours avec Matthieu. J’espère quelle durera toute la course, elle est donnée pour 10h d’autonomie.
Au ravitaillement, je m’aperçois que j’ai oublié ma gamelle en aluminium au précédent ravitaillement de Mille, maintenant les pâtes auront un gout de boisson énergisante et que ma boisson énergisante aura des morceaux de pâtes, dommage elle devait me servir pour le futur Marathon des Sables. Je me repose un peu au ravito et je perds de vue mon coureur Français, je crois qu’il est parti avant moi.

Un peu plus loin, un petit passage avant d’arriver sur la grosse montée m’emmenant sur la glacier de Panossière, je monte le long d’une rivière et je manque de perdre l’équilibre et de tomber quelques mètres plus bas, vraiment bizarre de perdre l’équilibre dans un sentier peu pentu mais sans aucune difficulté.

Et là d’un coup tout se complique, ce n’est plus une montée: c’est un pic! Je me vois ralentir et je commence à me faire doubler par tous les autres coureurs. Ça monte à 20, 25 ou 30%, je monte 5m je m’arrête, impossible de vraiment avancer. Alors tel un escargot j’avance au pas lent très. Je me fais doubler par tous, je croise mon pote de chambrée Alex (rencontré hier à La Fouly) qui s’envole comme un oiseau. Une Suisse avec un legging bariolé de rose s’envole également. Je n’avance plus vraiment et je me fais encore et encore doubler. Les jambes vont bien, le moral aussi mais je manque de souffle et impossible de mettre un pied devant l’autre, je ralentis.
Les chemins sont lunaires, le col au loin semble inaccessible et après c’est loin d’être fini, il y aura encore la remontée sur le glacier de Panossière.
Après un temps et une distance qui me semble interminable je passe ce premier col des Avouillons à 2640m. Un bénévole de la course nous encourage, il doit être là depuis des heures sans rien, dans le froid dans ce paysage désolé à encourager des fous, merci à lui.

La redescente est un mur, les bâtons sont de rigueur, une petit chute et bye bye, genoux, chevilles et mains. La descente est technique et très pentue, on passe par de tout petits lacets, un peu de ski sur la neige plus très fraiche et me voilà enfin sur cette passerelle de Corbassière. Dès que je mets un pied dessus je sens l’onde de choc des pas du précédent coureur me revenir dessus, la passerelle oscille ça semble solide, mais bon le grillage du sol me laisse plus qu’apercevoir la roche quelques 100m plus bas. Je n’ai pas le vertige, je marche dessus, il est interdit de courir, mais cela ne me tente pas vraiment de faire un 100m. Même si j’ai un foi inébranlable aux ingénieurs qui ont construit ce pont, je ne fais pas le fier et je me sens mieux sur le plancher des vaches valaisannes.

Au loin cela monte encore et encore, le jour est gris et au loin je vois des petits points qui montent sur le refuge de Panossière. Mais ces montées ne finiront-elles jamais? Et de nouveau je reprends ma marche sénatoriale et tous les autres coureurs me doublent de nouveau. La montée est un sacerdoce, je n’avance pas, je me traine. De nouveaux les quelques coureurs que j’ai doublé dans la petite descente, me repassent comme si le temps s’arrêtait pour moi. Un coureur me double, j’essaie de m’accrocher, mais peine perdue, il s’envole j’ai des plombs aux chaussures, je n’avance pas. Avant d’arriver au refuge de Panossière, je croise la Suissesse au legging rose qui m’avait doublée comme une furie, je m’interroge je ne comprends pas comment elle a pu me doubler aussi vite et n’être qu’a quelques mètres de moi?

Refuge Pannosière, 54.3km, 12h37 de course et 3560m de D+

Un ravito qui fait du bien, le plus dur est fait, il reste une vingtaine de km, je suis dans un paysage magnifique, un grande descente m’attend et ensuite juste le mur infranchissable de Lourtier.

Je redescends du glacier, petit a petit je retrouve la nature verdoyante et je quitte les paysages alpins. Je commence à doubler plusieurs coureurs, mais aussi ma coureuse Suisse au legging bariolé de rose. Je ne suis pas particulièrement rapide, mais d’autres sont plus lents que moi en descente et la descente est vraiment un chemin de randonnée.


Petit à petit le jour se couche, je vois une magnifique mer de nuage sur Lourtier, je mets un long moment à allumer ma frontale, je suis presque dans le noir complet quand je l’allume. Place à la nuit et au mur qui m’attend. Avant d’arriver à Lourtier je me perds sur une route bitumée en voulant envoyer un message à tous mes supporters de WhatsApp.
J’arrive à Lourtier non sans une certaine appréhension, Grégo m’a tellement parler de cette montée et vue ma vitesse dans les dernières montées j’ai peur de jamais voir le jour (plutôt la nuit) du sommet de La Chaux.

Lourtier, km 64.8, 15h01 de course et 2580m de D+

Je rentre dans le gymnase, je vois énormément de coureurs et coureuses qui m’ont doublé dans les précédentes montées. Des grimpeuses espagnoles qui m’avaient doublées il y a 20km ou 30km, la coureuse Suisse au legging rose. Je ne m’attarde pas trop, une photo pour mes braves supporters qui me sont toujours là. Je viens d’apprendre qu’Alain à abandonné il y a 1 heure, ici, à Lourtier. Il connait la montée et a abandonné, cela ne me réjouit pas, mais je me sens bien et je ne m’attarde pas, je vais affronter le monstre …

Au ravito de Lourtier


En sortant du ravitaillement, je me perds quelque peu et me revoilà vite sur le bon chemin. Et quel chemin, très vite je comprends ce que me disait Grégo. Une montée 20-25% sur du bitume, je quitte la ville ou village et je commence à rentrer dans la foret.
Très rapidement je me fais doubler par les coureurs de la X-Alpine (111km), ils sont partis bien devant moi, mais m’ont rattrapé et me double comme si j’étais une mobylette sur l’autoroute. 1, 2, 3 … je ne compte plus, ils me doublent tous.
Ce n’est pas « Ascenseur pour l’échafaud », cette montée est mon échafaud, je regarde ma montre le dénivelé n’évolue plus, ma vitesse non plus. Je bouge encore, je monte doucement, très doucement, tous me doublent et mon altitude ne bouge plus. Une fonction de ma montre me dit combien il reste de dénivelé … rien le chiffre reste indéfiniment à la même valeur. La montée est de 1200m et rien, toujours cette même valeur, je monte, je me repose, je me fais doubler. Des virages, des coureurs me doublent et non rien ne bouge, encore 1100m. Je n’avance plus, la seule indication de temps que j’ai, est le nombre de mètres de dénivelé, le compteur n’évolue plus que très très lentement: « N’aies pas peur de ralentir, aies peur de t’arrêter » cette phrase, je la connais bien, mais même si je bouge encore, rien ne me dit que je ne m’arrête pas. Je suis coincé dans une montée interminable et je n’en suis qu’au début.
Encore 1000m de D+, c’est interminable, combien de temps vais-je mettre à franchir cet échafaud. 10, 11, 12 coureurs me passent et je ne compte plus. Quelques coureurs de la X-Traversée me doublent, mais le calvaire continue. Après un temps qui me semble infini, me voici au tiers de la montée … je n’y crois pas. C’est impossible, je continue à monter dans le noir total. Les jambes vont bien, j’ai peu de souffle, je me repose tous les 10 mètres, mais je continue. Même si le temps semble figé, je continue et petit à petit les mètres restant à franchir diminuent, bizarre ils diminuent par palier de 10, 30 ou 50m.

La moité est faite, encore la même montée, je n’avance pas, ma vitesse minimale est atteinte, je tourne entre 30 et 40min/km, soit entre 1 et 2 km/h, mais pas encore 0, je résiste. Je monte dans le noir, je ne vois rien, je suis exactement à l’opposé de la grande descente de la dent du chat au Grand Trail du Lac d’Aix les Bains à la seule différence qu’arrivé au sommet ça ne sera pas fini.

En définitive, je vais mettre 3h à faire les 6km de montée. Petit à petit je vois le sommet et une grande tente dans le noir. Petit à petit le chemin se fait moins pentu et je commence à voir la lumière, pas du soleil, mais celle de la fin de mon long tunnel. Ma montre m’indique encore 100m de D+, je m’accroche sur mes bâtons, je continue à pousser, j’ai la rage de finir cette course.

Lachaud, km 70.8, 18h03 de course 4900m de D+

J’arrive au ravito du sommet tel un Roi, j’ai vaincu mon Dragon, mon Everest. Il ne reste plus que la descente. Je mange, je bois tant que je peux, le gout sucré de ma boisson cerise Decathlon me fait un bien fou. Je sens le sucre rentrer directement dans mes veines, je me sens invincible. J’allume mon téléphone, tous les messages de mes supporters. Quoi? NON ? Grégo vient de me dire qu’il a abandonné pour cause de blessure, aie j’ai mal pour lui. J’espère que ce n’est pas grave et que je pourrai le voir à la TDS dans 2 mois à Chamonix.

Je repars en trottinant, oui oui je trottine, mon combat ne m’a pas anéanti, je peux toujours un peu courir, pas vite et pas longtemps, mais ça fait du bien au cerveau de voir que tout ne va pas si mal. J’ai un vague souvenir de cette descente, petit à petit le chemin devient moins pentu, je commence à entendre des bruits de la ville de Verbier. Je double quelques coureurs, ou je me fais doubler je ne sais plus. Je sors du bois, j’entends le bip du chrono en arrivant sur le bitume, il reste quelques centaines de mètres que je fais en marchant. Courir ou marcher ne changera rien à mon temps, je finis en marchant calmement, je ne gagnerai aucune place en courant, je suis repu de courir.

L’arrivée: Verbier, km77, 19h42 de course et 4900m de D+

Dernier Virage à gauche, l’arrivée est et j’entends mon pote Grégo qui m’a fait le plaisir de venir me voir (il est 3h40 du matin). Ça me fait super plaisir qu’il soit là, j’en ai bavé sur cette course, pas physiquement, les jambes étaient bien, mais les montées étaient redoutables et interminables.
Et bien cette course c’est du brutal, comme le disait Bernard Blier dans les Tontons Flingueurs, il faut venir bien affuté car même si je n’ai pas souffert comme à d’autres courses, il faut avoir le cerveau bien accroché pour finir. Je n’ose pas imaginer la X-Alpine avec un rapport dénivelé/distance encore plus élevé.

Pannossière m’a bien détruit avec ses 2 cols à plus de 2500m d’altitude, mais le mur était plus un mur temporel d’où je n’arrivais pas à me sortir tellement j’étais lent. Mais les paysages sont magnifiques, le glacier de Panossière, même avec ce mauvais temps, était superbe. Je pensais que la course allait être difficile j’ai quand même été surpris.

Encore un grand merci à mes supporters qui m’ont encouragé tout au long de la course, un grand merci à mon pote Grégo d’être venu me voir à l’arrivée d’avoir fait la petite vidéo. Un grand merci aux bénévoles surtout à ceux qui se gelaient sur les cols à plus de 250m d’altitude.


Et aussi un grand merci à Decathlon pour la solidité de leur produits !! Non je ne suis pas sponsorisé